Un look loin de la rue, des cheveux longs et une grande be-bar, quasiment une dégaine de punk, qui se définit d’ailleurs comme un « artiste factice pas d’street-cred » (IPC). Ajoutez à ça une voix qui a tendance à partir dans les aigus et vous obtenez LOAS. La moitié de DFHDGB (Des Faux Hipsters et Des Grosses Bites, tout un programme) avec Hyacinthe, fait aussi des projets en solo, puisqu’il a sorti un EP « NDMA » en 2015 et un maxi, « VLV », fin de la même année, qui est d’ailleurs devenu l’hymne officiel d’une partie du cortège de têtependant le printemps social de 2016. Rien que pour ce titre LOAS devrait être admis au panthéon, mais bon on va quand même creuser un peu le personnage.
Le flow est calé, fluide, empruntant notamment à la trap, mais sur des prods un peu plus (voire carrément plus) énervées et plus rapides, rappelant certains courant tels que la trance ou gabber. La voix est parfaitement maitrisée, et c’est un des grands outils de L.O.A.S, passant habilement entre unedouceur quasiment chantée et des hauteurs suraigües qui renforcent l’impression d’hystérie de l’artiste (le titre « Parce que » illustre parfaitement cette maîtrise vocale). Mais le plus important chez L.O.A.S restent les paroles, qui pourraient quasiment mener à une dissertation en 6h (si si, ses textes rappellent des souvenirs de classe prépa). On pourrait trouver un mélange de nihilisme, écho d’une jeunesse désabusée, mais abusant de substance, mais aussi de révolte voire de haine (le titre de l’EP NDMA peut aussi se lire « haineDMA »), contre le monde actuel. Si la résignation est à l’œuvre, le soulèvement, voire le romantisme l’est également notamment dans « VLV » et cette magnifique phrase, pleine d’énergie et d’optimisme :
“Rejoins moi dans les émeutes on va s’aimer”
La spiritualité est également très présente, avec une aspiration à s’élever, comme pour fuir un monde trop dur, trop absurde. Pour autant elle est sans cesse ramenée à du trivial, rappelant certains vers de Baudelaire voire de Mallarmé (mon esprit de khâgneux s’excite, pardon) :
“Dieu est amour mais le diable fait des trucs de ouf avec sa langue”
(Derrière les cyprès)
Pour autant les affres de la jeunesse, entre boîte, drogues et plans culs pour passer le temps complètent le tableau de la vie du narrateur. Mais cette vie banale de millions de jeunes donne lieu à une poétisation extrême chez L.O.A.S :
“Le club au fond de l’impasse les cimetières derrière les cyprès
2-3 bagues en argent j’ai pensé que ça t’exciterait
Pleine lune plein de putes sortent d’un vieux film sous-titré
Je me sens si loin parce que la mort est si près”
(Derrière les cyprès)
C’est ce tiraillement entre élévation du quotidien et rabaissement du spirituel, le tout servant d’échappatoire à un quotidien, l’échappée passant parfois par la mort (« Déjà mort ») ou par la folie (« Parce que »). Si l’expression « poète moderne » est absolument affreuse et dans 99% des cas dépourvue de sens, elle est tout à fait adéquate pour décrire LOAS. Sa filiation avec les poètes du 19ème siècle est claire tant dans leur fougue que leur décadence : un attachement au sublime plus que perceptible.