ZEKWÉ : ÉTERNEL ROOKIE

Ça fait maintenant un bail que Zekwé anciennement Zekwé Ramos traine sa carcasse dans ce foutu rap game, et on ne peut pas dire que ce dernier le lui rende bien. Originaire du 91, une des  grosses scènes du rap français (du Gouffre en passant par Eloquence jusqu’à plus récemment PNL), l’artiste d’origine cap verdienne fut longtemps un homme de l’ombre. Derrière les machines, fournissant des beats pour des artistes tels queDany Dan, ou encore Unité 2 Feu. Il a notamment produit la moitié du légendaire album Haine, Misère et crasse.

Si le producteur enfilait parfois une casquette de rappeur, pour quelques couplets par-ci par-là, ce n’est qu’en 2011 qu’il décide de se lancer réellement, dans la mythique écurie Néochrome, avec l’album “Selecao“. Le succès critique est au RDV. Genono notre « Olivier Cachin trash des bas fonds du rap » disait de lui : « à un moment, on a tous cru que Zekwé allait devenir un genre de Kanye West français ». Cependant les ventes ne suivent pas, mais ce n’est pas ce qui va freiner le rappeur. Pour preuve : la récente sorti de son 3ème album : Frapp Musiq en juillet dernier, son premier EP en dehors de Néochrome (entièrement produit par ses soins).

Ce 9 titres est sorti dans un relatif anonymat. Selon nous, il aurait mérité bien plus de reconnaissance. Caril est tout d’abord magnifiquement produit par Zekwé himself, les beats sont variés, que ce soit au niveau du tempo ou des sonorités, mais arrivent toujours à se démarquer et à parfaitement servir son flow. Parfois tranchant et saccadé, comme sur le titre « Zombie » (magnifique introduction au passage). Parfois beaucoup plus trainant comme sur « Toudanlkalm ». Zekwé nous éclabousse même de son talent technique en poussant la chansonnette sur « Premier métro », morceau qui était déjà présent sur Selecao 2.0. Un EP qui démontre la palette technique de Zékwé et sa polyvalence track après track. 

L’écriture quant à elle arrive en second plan, dans le sens où elle sert surtout à manier l’art de la punchline. Foncez écouter « Toudanlkalm » si les punchlines vous animent. Pour autant, on se rend compte que Zékwé est capable d’autre chose, le morceau « Premier métro » en est la preuve. Ce son dresse le portrait d’une « Cendrillon » du ghetto et raconte sa relation avec le personnage de Zekwé. Il nous montre là sa capacité à écrire de superbes storytelling. On comprend que le raclo ne se fait aucune illusion sur ses possibilités de percer avec Frapp musiq puisqu’il affirme sur Facebook, avec une bonne dose d’autodérision, qu’il va « vendre 4 albums mdrr ». La musique de Zekwé est accessible et dansante (des critères parfaits pour entrer en rotation), mais elle est également de très bonne qualité.À l’image de Seth Gueko ou Alkapote qui bénéficient en ce moment d’une deuxième naissance dans le jeu,Zékwé n’est pas à l’abri d’un tardif succès. Il pourrait réconcilier les puristes et les novateurs, voire même le mainstream et l’underground. Chose qu’on observe beaucoup aux Etats-Unis, mais encore trop peu en France.

 

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